samedi le 2 juillet 2016

 

 

Espace Saint Cyprien, Toulouse

 

 

 

Madame Yvonne

 

 

 

 

 

 

Le festival Tangopostale 2016 commence pour à l'Espace St-Cyprien. Comme je voulais être parmi mes compatriotes belges pour photographier l'ambiance dans le village foot à Bruges à l'occasion du quart de final Belgique - Pays de Galles, qui se jouait jusqu'à 22.45 heures, nous ne pouvions que partir vers minuit et nous voyaient obliger de rouler. Mais tout se passait bien et nous arrivons à temps pour la pièce de théâtre.

 

 

 

Il restait même du temps pour nous avonturer dans le décor.

 

 

 

 

 

 

 

Christian Couderette, le président de Tangopostale, nous explique que le thème approfondit au festival cette année, c'est "les ports" et par extension l'immigration et la prostitution, deux phénomènes bien présents à Buenos Aires à l'époque.

 

 

 

 

 

 

 

 

Si l'on peut croire les statistiques, une 40.000 de femmes françaises se seraient lancées dans le métier de la prostitution à Buenos Aires. Albert Londres, journaliste investigateur, n'ayant pas peur de se rendre sur place pour écrire ses histoires, décida d'en consacrer un livre "Le chemin de Buenos Aires".

 

 

 

 

 

 

 

Après se rendre à Paris sur le faubourg Saint-Denis pour y rencontrer des maquereaux et se renseigner sur leurs pratiques et méthodes de chercher des femmes prêtes à être exportées, il se rend à La Havre pour y emprunter le bateau vers Buenos Aires.

 

 

 

 

 

 

 

A bord il repère très vite ces femmes souvent peu éduquée et facilement “manoeuvrable”. Albert Londres ne la présente pas comme des femmes désepérées. Beaucoup d’entre eux ont un enthousiasme innocent, qui est accompagné presque constamment d’une quête de vie meilleure, quel qu’en soit le coût.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Une fois arrivé à Buenos Aires, Albert part à la rencontre de la “Franchucha” (terme qui désigne aussi bien la Française que la fille de mauvaises moeurs) et des hommes dont elles dépendent (les maquereaux).

 

 

 

 

 

 

Sur Esmeralda, il rencontre un groupe de proxénètes qui ressemblent à des dandys bourgeois ;  Victor le victorieux lui raconte son parcours, et ses “achats“. “Nos femmes sont des machines à sous”… rien n’est plus vrai. Pendant que messieurs devisent entre eux, leurs femmes bossent dur…
Victor évoque Rita, celle qu’il a acheté à moitié, sa “demie-femme”; elle était trop chère pour lui tout seul, il a dû la partager avec un autre proxénète. Car il existe bel et bien un mercato de la femme. On peut vendre ses “possessions”, se les échanger…

 

 

 

 

 

Et comment voit-il l’avenir Victor le victorieux? “Dans un an ma femme (la principale) cessera le travail. Elle a gagné ses galons. Moi je vendrai ce qui me reste (ses trois femmes d’Argentine), je rentrerai en France et tous deux, désormais bourgeois, elle fière de moi et moi, fier d’elle, nous irons l’hiver à Nice, le printemps à Saint-Cloud, l’été sur la Marne et l’automne à Montmartre”. Tant de romantisme, on en verserait presque une petite larme…

 

 

 

 

 

 

 

 

Les maquereaux se présentent de fait en “protecteur”, voire en bienfaiteur ! “Le métier de maquereau, monsieur Albert, n’est pas un métier de père de famille! Il nous faut être administrateur, éducateur, consolateur, hygiéniste”.

Le ruffian souligne qu’il y a une vraie prise de risque : il faut bien sûr miser sur le “bon cheval”. Qui sont donc les jeunes femmes qu’ils convainquent de travailler pour eux à l’autre bout du monde? Des filles “avec une bonne mentalité, c’est-à-dire docile[s], pas féministe[s]”. Et puis pour en remettre une couche, il faut se rendre compte, nous assènent les maques que sans eux, les femmes “fument, boivent, dansent, prisent de la coco, s’offrent des béguins, découchent, se marient entre elles!”. La perdition…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La jeune femme qui part pour Buenos Aires sait-elle ce qui l’attend ? La plupart du temps, la réponse semble positive. Si elle accepte ce "destin", c’est souvent parce que sa vie de prostituée est bien meilleure que celle qu’elle menait en France. Les maquereaux leur paient de jolis robes, leur mettent un toit sur la tête –parfois élégant-, et elles peuvent conserver une partie de leur paie qu’elles envoient à leur famille. Albert Londres cite le cas de Germaine X qui refuse la proposition du consul de France pour l’aider à rentrer en France. "Je suis heureuse comme je suis".

 

 

 

 

L’enquête, bien sûr, ne serait complète sans une visite au « prostibulo ». Les Françaises se trouvent pour la plupart dans les "casas francesas", où l’on fait la queue pour attendre son tour… C’est donc ici que s’empressent de courir les Argentins en conclut Londres. On y rencontre des Mademoiselle Opale, des mademoiselles Rubis, qui ne se plaignent semble-t-il jamais de leur sort.

 

 

 

 

 

 

 

 

Pour rendre encore plus réelle la pièce, des hommes parmi les spectateurs sont priés de se rendre sur scène.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ils y font la queue avant de passer quelques moments en dessus ou en dessous la dame dans la chambre derrière.

 

 

 

 

 

 

Et comment Mademoiselle Yvonne, comment va-t-elle? La réponse viendra quelques années plus tard dans la chanson chanté par Carlos Gardel:

Madame Yvonne

Letra de Enrique Cadicamo. Musica de Eduardo Pereyra (1933)

 

Mamuasel Ivonne era una pebeta
que en el barrio posta de viejo Montmartre,
con su pinta brava de alegre griseta
animó la fiesta de Les Quatre Arts.

Era la papusa del barrio latino
que supo a los puntos del verso inspirar…
Pero fue que un dia llego un argentino
y a la francesita la hizo suspirar.

Madame Ivonne,
la Cruz del Sur fue como el signo,
Madame Ivonne,
fue como el signo de tu suerte…
Alondra gris,
tu dolor me conmueve,
tu pena es de nieve…
Madame Ivonne…

Han pasado diez años que zarpó de Francia,
mamuasel Ivonne hoy solo es Madam…
la que va a ver que todo quedó en la distancia
con ojos muy tristes bebe su champán.


 

 

 

Ya no es la papusa del Barrio Latino,
ya no es la mistonga florcita de lis,
ya nada le queda… Ni aquel argentino
que entre tango y mate la alzó de Paris “Mademoiselle” Yvonne était une petite
dans l’excellent quartier du vieux Montmartre;
avec son allure voyante de joyeuse grisette,
elle égayait les fêtes des Quatre Arts.
*
C’était la belle du Quartier Latin
qui aux artistes elle sut inspirer,
mais un jour débarqua un argentin,
et à  la petite française il fit soupirer…
*
« Madame Yvonne »…
La Croix du Sud fut comme un signe.
« Madame » Yvonne…
le signe de ton destin.
Grise alouette,
ta douleur me bouleverse…
ton chagrin est de neige,
“Madame” Yvonne…

Dix ans sont passés depuis qu’elle a lâché la France,
“Mademoiselle” Yvonne n’est plus aujourd’hui que “Madame”.
celle qui voit que tout s’éloigne,
les yeux tristes, boit son champagne.

Elle n’est plus la belle du Quartier Latin,
elle n’est plus la petite fleur de lys…
il ne lui reste plus rien…même pas son argentin,
qui entre tango et mate, l’a arraché de Paris.

 

 

 

 

 

 

Multiples sont aussi les observations de la ville de Buenos Aires. Un exemple:

Eh bien ! Cela, c’est Buenos Aires. Comme je vous le dis ! Nous y voici. Et il n’y a pas de quoi perdre la respiration. C’est une capitale. C’est même la capitale de la République argentine. Je ne dirai pas le contraire. Il y a là deux millions d’habitants. Ils s’y trouvent bien. Tant mieux!Je ne dissimulerai rien. Même pas la rue de vingt-deux kilomètres de long. Elle y est. Qu’elle y reste. Elle s’appelle Rivadavia. Ai-je fait ses vingt-deux kilomètres ? J’ai essayé. Au quatorzième, je suis revenu définitivement écœuré de la ligne droite. Il faut être ivre pour concevour 22 kilomètres de ligne droite.

 

 

 

J’avais un plan de Buenos Aires. ­Il faudrait un individu infiniment remarquable pour circuler sans plan à Buenos Aires. C’est un nid d’abeilles. C’est fait comme un radiateur d’automobile. Les alvéo­les s’appellent cuadres. Cuadre veut dire carré. Ce sont des carrés ­parfaits de cent mètres de côté. Buenos Aires est un intermina­ble champ?où?l’on?a?plan­té?des ­mai­­sons, hectare après hectare. D’étroits sillons séparent chacun de ces hectares bâtis, ce sont les rues. Parcourir Buenos Aires n’est pas marcher, c’est jouer aux dames avec ses pieds. On se croit un pion que l’on pousse à angles droits, sur un damier.

 

 

 

 

 

 

 

La pièce est jouée par la TEI (Troupe Ephémère et Improbable), qui constitue des danseurs et comédiens amateurs d’associations à Montauban et Cahors.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le récit d'Albert Londres rencontra un vif succès, sauf auprès de la presse argentine, qui lui reprocha son indulgence envers les proxénètes. Si le livre a rencontré un vif succès auprès du public lors de sa parution, c'est qu'Albert LONDRES, avec sa faconde naturelle, sa volubilité enjouée et entraînante, a agrémenté son propos d'une bonne dose d'humour et d'ironie mordante. Le père du journalisme moderne pointe les causes majeures du problème : le chômage et la misère. Sa volonté est d'interpeller ses congénères et exhorter notre société à assumer ses responsabilités pour pallier à la pauvreté qui conduit inévitablement à la prostitution.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La pièce de théâtre est suivie d’une conférence au sujet de la prostituion et migration par Françoise Guillemaut, sociologue et maître de conférences.

 

 

 

 

 

 

 

 

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